- 1860-1875 : Joseph Marie Leroy (1812 -1883) et Robert Hippolyte Queudray (1827-1867) puis en 1865 Donatien Stanislas Avice (1852-19??) et en 1871 Frédéric Simon Masson (1815-1897) comme adjoints
Au terme de son 3e mandat, il semble que les relations entre le maire et une partie de ses conseillers n'étaient pas les meilleures... Le 18 mai 1875, à l'issue d'une séance ordinaire du Conseil Municipal, huit conseillers municipaux rédigent une déclaration commune à l'intention du Sous-Préfet des Andelys, Émile Cotelle, du Préfet de l'Eure Joseph Jean Charles Louis, baron Sers, et du Ministre de l'Intérieur nouvellement nommé, Louis Buffet : "Les conseillers municipaux de la commune de Corny, arrondissement des Andelys, Eure, déclarent que, réunis en session ordinaire, après avoir terminé tout ce qui concernait le budget, l'un d'eux [Alphonse Lachartre] ayant demandé tant en son nom qu'en celui de plusieurs conseillers, à donner lecture d'une interpellation à Monsieur le Maire au sujet des sentes et chemins ruraux de la commune, il lui a été imposé silence, et que sur la protestation de tous les membres présents, Monsieur le Maire, revêtu de son écharpe, les a sommés de quitter immédiatement la mairie. Les soussignés pour rester dans leurs droits n'ont pas cru devoir résister à cet ordre mais ils protestent de toutes leurs forces contre cet abus de pouvoir". Dès le 21 mai, le cabinet du Ministre demande des explications au Préfet de l'Eure.
Il semble en fait que cette séance houleuse ne soit que l'épilogue d'un conflit plus profond et plus lointain entre le maire et une partie de ses administrés...
Aux Archives départementales de l'Eure où ces pièces sont conservées (cote 3M644), tout commence par une lettre envoyée au Préfet par des habitants de Corny (on ne connaît ni leur nombre ni leur identité) qui, à l'issue des élections municipales de novembre 1874, tandis que, contre le résultat des urnes, Joseph Leroy se maintient dans ses fonctions de maire, adressent "en forme de résumé tout ce qu'a fait Mr Leroy pour exciter contre lui la vindicte publique des habitants de Corny".
S'en suit une longue liste d'abus de pouvoir, de pressions, de confiscations ou punitions arbitraires, de procès intentés, etc. Cet épisode de l'occupation du village par les prussiens est particulièrement édifiant, pour peu qu'il soit avéré (la présomption d'innocence vaut, même cent-cinquante ans plus tard...) : "Février 1871 : La commune de Corny est imposée par les prussiens à leur payer 5 575 francs. Mr le maire fait immédiatement publier au son de caisse une proclamation que si les chefs de famille n'apportaient pas le lendemain matin 25 f par tête d'habitant suivant leur ménage, ils seraient passibles du logement des prussiens, traînés comme otages en Allemagne, ils verraient leurs maisons pillées incendiées. Que lui et son fils payeraient leur part et laisseraient à la merci des prussiens qui n'exécuteraient pas la dite proclamation". Les villageois demandent l'intervention du Préfet pour "nous rendre justice en accordant à notre malheureuse commune un nouveau maire, qui saura rendre le pays heureux et tranquille". Cette pétition des habitants, c'est le Sous-Préfet qui finalement l'adresse au Préfet, en lui demandant la révocation de Mr Leroy, par une lettre du 26 mars 1875.
Toujours à charge contre Joseph Leroy, un certain "Vallangelier" [Paul Honoré, natif des Andelys ?] écrit le 20 avril 1875 au sous-secrétaire d'Etat, lui faisant un rapport peu élogieux de l'administration de la commune par Joseph Leroy : "Depuis quelques temps, Mr Leroy, Maire de Corny, me poursuit incessamment d'allusions malveillantes à l'égard de l'administration de Monsieur le Sous-Préfet, et tout dernièrement encore, dans un café en présence du maître de l'établissement, il disait à haute voix qu'il n'était pas soutenu aux Andelys, qu'on était contre lui, qu'on soutenait le conseil municipal qui est composé de radicaux (ce qui n'est pas). Que l'enquête faite par Mr le Sous-Préfet lui avait donné bien du tourment et occasionné bien des démarches, qu'il était allé à Paris et avait serré la main au Ministre et qu'il resterait quand même et malgré tout maire de Corny. (...) Par suite de tracasseries continues, Mr Leroy en est arrivé à se faire détester dans la commune (...)".
Enfin, la parole est à la défense... C'est d'abord une nouvelle pétition de trente villageois, signataires cette fois, qui "prient monsieur le Préfet de repousser ces plaintes ou plutôt de les faire cesser. Le maire actuel, homme zélé,a toujours rempli pendant 15 années les fonctions [de maire] de cette commune (...) il les continuera avec le même zèle".
Document conservé aux Archives départementales de l'Eure, sous la cote 3 M 644 |
Dans une lettre du 30 mars 1875, le Préfet prend presque fait et cause pour Joseph Leroy, après s'être entretenu avec lui et, en vertu des 15 années passées au service de l'administration, demande au Sous-Préfet une enquête impartiale.
Ensuite l'accusé lui même par une lettre adressée au Préfet le 27 mai 1875 défend son bon droit, justifiant sa conduite pendant la séance du 18 mai. Finalement, le Préfet envoie le 4 juin 1875 la dernière lettre ci-dessous à Joseph Leroy, ce qui clos définitivement l'affaire de Corny.
"Vous m'avez spontanément et à plusieurs reprises, offert votre démission de maire de Corny, pensant que par suite des difficultés qui avaient surgi entre vous et votre conseil municipal et de la situation exceptionnelle que vous avaient faite les dernières élections, il vous était impossible de rendre à votre commune les mêmes services que par le passé.
J'ai l'honneur de vous informer que je crois devoir accepter cette démission rendue nécessaire aujourd'hui, non seulement par le résultat de l'enquête provoquée par Monsieur le Sous-Préfet, mais aussi par le dernier incident qui s'est produit au sein du Conseil Municipal de Corny et qui a motivé contre vous une plainte de la majorité des représentants de cette commune.
Je vous remercie du concours que vous avez prêté à [l'administration] et vous invite à remettre les [...] aux mains de M. Bertaut qui doit vous succéder."
Le Petit journal. Supplément du dimanche du 10 juillet 1898 BnF, Bibliothèque de l'Arsenal, FOL-JO-904 |
Lire aussi cet article au sujet de Joseph Leroy.
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